Quand mes enfants sont nés, je me suis vite fait une joie de leur préparer de multiples activités créatives, ou pédagogiques qui occupaient nos week-ends ou nos vacances. Plus ils grandissent, plus je constate au quotidien leur besoin de temps libre, de rêverie, d’oisiveté, et surtout de jeu, sans aucune intervention de ma part ! Je me suis donc renseignée sur l’importance du jeu libre, et suis aujourd’hui convaincue de ses bienfaits, et de l’importance en tant que parent de lui rendre toute sa place.
Winnicott, André Stern, Peter Gray…nombreux sont les auteurs décrivant les dispositions natives de l’enfant pour le jeu. Le bébé fait preuve très tôt d’une curiosité innée et d’un besoin d’apprendre, soutenu par une motivation intrinsèque, qui viendront éveiller son envie de jouer.
On différencie le jeu libre du jeu structuré/dirigé. Le jeu structuré sera pour les petits un jeu dirigé par un adulte, qui lui présentera une activité précise. Pour les plus grands, on introduira rapidement des règles (comme dans les jeux de société). Ces jeux sont importants, car ils favorisent la concentration, la réflexion, le respect d’autrui, mais ils ne sont pas primordiaux.
Le jeu libre lui, est “une nécessité pour l’enfant. Une prédisposition, un penchant, souvent un impératif. Un accomplissement profond. L’enfant ne joue pas pour s’amuser, se divertir ou avoir du plaisir, Mais pour l’enfant, jouer comprend beaucoup d’efforts, beaucoup d’attention, beaucoup de dépassement de soi” -A. Stern, “ Jouer”. L’enfant va jouer à ce qu’il veut, avec le matériel qui l’intéresse et qui l’attire, sans intervention de l’adulte.
Malheureusement, au fil du temps, les opportunités de jeu libre offertes aux enfants ont progressivement décliné. Le temps passé à l’école, à faire les devoirs, les activités extra-scolaires, remplissent toujours plus les emplois du temps des enfants, qui se retrouvent vite surbookés et chronométrés. D’autre part, le temps dédié aux écrans augmente aussi avec la multiplication des supports (tv, tablette, ordinateur, téléphone, consoles, jeux électroniques) au détriment des plages horaires de jeu libre (les journées n’étant pas extensibles). Il faut aussi souligner pour les enfants plus grands, les peurs irrationnelles des parents (notamment propagées par les différents médias), comme les enlèvements, l’insécurité… ainsi, les enfants passent de moins en moins de temps seuls, et/ou dehors.
Intérêts du jeu libre
Tout d’abord, au cours du jeu libre, l’enfant va développer sa créativité et son imagination. Il s’invente des histoires, crée ses propres règles (parfois totalement arbitraires). Il va utiliser un bâton qui sera tour à tour baguette magique, canne à pêche, cuillère pour la soupe ou petit avion. Il pourra imiter, jouer des rôles, et tout cela va favoriser sa pensée créative.
Améliorer l’autonomie et la confiance en soi : pendant le jeu libre, l’enfant prend des initiatives et peut faire ses propres choix. Il va apprendre à prendre des risques (notamment lors des jeux physiques en extérieur). S’il joue avec d’autres enfants, il découvrira la nécessité de s’ajuster, de maîtriser ses émotions, d’apprendre à coopérer, et tout cela construit les bases de sa socialisation, sa conscience de soi et des autres.
Le jeu est le meilleur dispositif d’apprentissages : en réalisant ses propres expériences physiques, il développera sa pensée logique, ses propres déductions. Il pourra aussi bénéficier de l’expérience de ses camarades de jeux (amis, fratrie). Pourtant, la pensée dominante, à l’heure actuelle, définit l’adulte comme source prioritaire de connaissance… alors que l’enfant apprend à chaque minute, et encore plus quand il est enthousiasmé par le support d’une activité qui attire son attention à cet instant précis.
Quel est le rôle de l’adulte ?
Finalement, notre rôle en tant que parent est simple : tout d’abord proposer le temps et l’espace pour le jeu libre. S’octroyer des journées où rien n’est planifié, où l’enfant aura tout le loisir de s’ennuyer, et de s’installer pour jouer seul (ou avec ses pairs). Et chaque jour, prévoir des plages horaires où rien ne sera imposé à l’enfant (déjà un challenge dans notre société non?!). Si votre enfant a du mal à jouer seul, prenez part à SON jeu pendant quelques minutes, et bien vite, vous pourrez vous effacer et le laisser dans son univers.
Ensuite, intervenez le moins possible, mais soutenez et étayez du regard ( il s’agit d’encourager par notre attention plutôt que par les mots).
Préparez du matériel attirant, agréable. Avec des jouets de qualité et adaptés à son âge (et à ses goûts !) à sa disposition, il pourra les utiliser quand bon lui semble. Jeux de constructions, loose parts, animaux, personnages, bouts de tissu, matériel créatif… pas besoin d’en avoir en grande quantité, le plus important est qu’ils soient accessibles !
Bien sûr, si l’environnement est ouvert à toute exploration, dans le respect de ses centres d’intérêt et de ses besoins, tout en étant sécurisé, l’enfant prendra d’autant plus plaisir à l’investir.
Maintenant, préparez-vous un thé ou un café, vaquez à vos occupations, prenez tout votre temps, et… laissez-les jouer !